04/04/2024

Évaluation de l'EPU: de la recherche à la pratique

Au milieu des couloirs animés de la 55ème session du Conseil des droits de l'homme, des délégués d'État, des membres d'organisations de la société civile (OSC) et des défenseurs de différents pays ont participé à un événement discutant de l'impact de l'Examen périodique universel (EPU) sur le système de protection des droits humains au niveau national. 

UPRAN side event hrc55

L'événement, intitulé "L'EPU et la protection des droits humains au niveau national", qui a eu lieu le lundi 25 mars 2024, a été organisé par la Mission permanente de l'Uruguay en partenariat avec le Réseau académique de l'EPU (UPRAN) et UPR Info. 

Au cours de l'événement, les orateurs et les participants ont souligné l'importance d'un engagement significatif dans le processus de l'EPU, reconnaissant son potentiel de transformation dans la sauvegarde des droits humains dans le monde entier. En outre, ils ont souligné la nécessité de mettre en évidence l'impact et les changements apportés par l'EPU. Tout au long de la discussion, les intervenants ont eu l'occasion d'échanger leurs expériences, leurs bonnes pratiques et leurs défis dans le processus de l'EPU. 

L'un des défis auxquels l'EPU est confronté est la critique et la crainte des universitaires et des praticiens qu'il puisse saper les recommandations d'autres mécanismes fondés sur des normes juridiques existantes, tels que les mécanismes des organes de traités. Dans le cadre de l'UPRAN, la professeure Elvira Domınguez Redondo (Kingston University) et la professeure Rhona Smith ont abordé cette question en examinant les recommandations thématiques reçues par chaque État au cours du troisième cycle de l'EPU. Ils ont observé une concordance de plus de 50 % entre l'EPU et les recommandations des organes de traités, et ont noté que cette corrélation s'oriente désormais vers les objectifs de développement durable (ODD).

 

La professeure Domınguez Redondo a mentionné que son étude a utilisé une méthodologie qui comprenait l'analyse de cinq pays, en mettant l'accent sur ceux qui reçoivent le plus de recommandations des organes de traités tels que l'Ukraine, l'Italie, l'Équateur et le Qatar. Elle a noté que des difficultés persistent, notamment la langue non normalisée et les données manquantes. Néanmoins, elle a noté le langage normalisé dans les recommandations sur des sujets spécifiques tels que ceux relatifs à la criminalisation de l'avortement. Malgré ces défis, le professeur Domınguez Redondo a souligné que l'EPU a produit des données indexables significatives, suggérant le potentiel de normalisation de l'alignement linguistique. 

Prof Elvira Redondo

"Je n'ai aucun doute sur le fait que l'EPU est le meilleur moyen d'intégrer les normes internationales en matière de droits de l'homme et de les traduire en lois et pratiques cohérentes dans un processus impliquant les différentes branches du gouvernement et de nombreuses autres parties prenantes nationales", a déclaré Gianni Magazzeni, ancien chef du service de l'EPU au HCDH et membre du comité d'UPR Info.

 

Le Dr. Damian Etonne a souligné l'importance de l'EPU dans la justice transitionnelle, illustré par les cas du Burundi et du Sud-Soudan.  Dans ces cas, l'EPU a servi de plateforme pour promouvoir la responsabilité dans la phase de post-conflit, renouveler la visibilité des recommandations et contribuer à la paix en fournissant des données cruciales et en encourageant le dialogue. De nombreuses recommandations ont porté sur la justice transitionnelle et les mécanismes nécessaires. Selon le Dr. Etone, la contribution de l'EPU à la justice transitionnelle est évidente dans trois éléments clés : tout d'abord, la fréquence avec laquelle les questions sont soulevées indique une focalisation et amplifie les mécanismes de responsabilité et de réparation ; ensuite, sa capacité à saisir un large éventail de questions favorise une approche holistique, y compris les poursuites pénales et la responsabilité ; enfin, sa spécificité et ses recommandations ciblées offrent une facilité d'utilisation et une orientation, ce qui rend leur impact plus mesurable.

L'analyse et la recherche menées par les chercheurs et les universitaires sont inestimables pour mieux comprendre l'EPU en tant que mécanisme des droits de l'homme et pour identifier la manière dont les États et les autres parties prenantes s'engagent avec lui pour mettre en œuvre les recommandations. À cet égard, l'UPRAN a réuni des experts pour diffuser les résultats de leurs recherches dans une publication intitulée "Human Rights and the UN Universal Periodic Review Mechanism - A Research Companion" (seulement disponible en anglais).
 

Side Event photo

L'événement a été l'occasion de formuler des recommandations à l'intention des États et des membres de la société civile. Dre.  Louisa Ashley (Leeds Law School) a centré son intervention sur le rôle de l'EPU dans la promotion et la protection des droits des paysans. Malgré la controverse initiale et le manque de soutien significatif pour la déclaration des Nations Unies concernant les droits des paysans, elle a souligné le besoin continu de plaidoyer et de soutien sur cette thématique. Dre. Ashley a exhorté les délégations nationales à accroître la sensibilisation aux droits des paysans par le biais de l'EPU et a plus particulièrement recommandé aux États qui ont voté en faveur de la Déclaration des droits des paysans de se concentrer sur la mise en œuvre de mesures visant à soutenir ces droits. En outre, elle a suggéré que ces États déposent des questions avancées, ciblant particulièrement ceux qui ont voté contre la Déclaration, afin d'initier un dialogue et de les inciter à reconsidérer leur position. 

Des recommandations ont été adressées aux OSC, soulignant l'importance de leur plaidoyer continu pour les droits des paysans dans le cadre de l'EPU. De plus, UPR Info a reçu une recommandation spécifique pour inclure les paysans comme un label distinct dans la base de données d'UPR Info. Cette mesure viserait à améliorer la visibilité et la reconnaissance des questions relatives aux droits des paysans, facilitant ainsi un suivi et des rapports plus complets dans le cadre de l'EPU.

Dans l'ensemble, l'événement a mis en évidence l'importance d'une collaboration et d'un dialogue continus entre les parties prenantes afin de garantir que l'EPU reste un mécanisme solide pour promouvoir les droits de l'humains et susciter des changements positifs aux niveaux national et international.